Etats de choc, Bêtise et savoir au XXIe siècle
EAN13
9782755505030
Éditeur
Fayard/Mille et une nuits
Date de publication
Langue
français
Fiches UNIMARC
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Etats de choc

Bêtise et savoir au XXIe siècle

Fayard/Mille et une nuits

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L’impression que la déraison domine désormais les hommes accable chacun
d’entre nous. Que la rationalisation qui caractérise les sociétés
industrielles conduise à la régression de la raison (comme bêtise ou comme
folie), ce n’est pas une question nouvelle : Theodor Adorno et Max Horkheimer
nous en avertissaient déjà en 1944 – au moment où Karl Polanyi publiait La
Grande Transformation.
Cette question a cependant été abandonnée, tandis qu’au tournant des années
1980, la rationalisation de toute activité, rapportée au seul critère de la «
performance », était systématiquement et aveuglément orchestrée par la «
révolution conservatrice » – imposant le règne de la bêtise et de l’incurie.
Tout en mettant en évidence les limites de la philosophie qui inspirait
l’École de Francfort, le post-structuralisme laisse aujourd’hui ses héritiers
désarmés devant ce qui s’impose comme une guerre économique planétaire et
extrêmement ravageuse.
Naomi Klein a soutenu que la théorie et la pratique ultralibérales inspirées
de Milton Friedman reposaient sur une « stratégie du choc ». L’« état de choc
» permanent règne cependant depuis le début de la révolution industrielle – et
plus encore depuis le temps où s’applique ce que Joseph Schumpeter décrivit
comme une « destruction créatrice », caractéristique du modèle consumériste.
À partir des années 1980, sous l’impulsion de Ronald Reagan et Margaret
Thatcher, l’état de choc technologique a été suscité par un marketing
planétaire ne rencontrant plus aucune limite, imposant la prolétarisation
généralisée, et détruisant l’économie libidinale : ainsi s’est installé le
capitalisme pulsionnel où la destruction créatrice est devenue une destruction
du monde.
L’état de choc est ce que le post-structuralisme n’aura pas pensé,
principalement en raison de deux malentendus : 1. quant au sens de la
prolétarisation (que Marx pense avant tout comme une perte de savoir induite
par un choc machinique), 2. quant à la nature de l’économie libidinale (au
sein de laquelle Freud, à partir de 1920, distingue la libido de la pulsion).

Bernard Stiegler, philosophe, est notamment l’auteur de La Technique et le
Temps, Mécréance et discrédit, Prendre soin. De la jeunesse et des générations
et Ce qui fait que la vie vaut la peine d’être vécue. Depuis 2006, il dirige
l’Institut de recherche et d’innovation (IRI) et préside l’association Ars
Industrialis, Association internationale pour une politique industrielle des
technologies de l’esprit.
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