Au piège de la vengeance
EAN13
9782280842075
ISBN
978-2-280-84207-5
Éditeur
Harlequin
Date de publication
Collection
Création pour reprise (2785)
Dimensions
17 cm
Poids
82 g
Langue
français
Langue d'origine
anglais
Fiches UNIMARC
S'identifier

Au piège de la vengeance

De

Harlequin

Création pour reprise

Indisponible

Autre version disponible

1.

Depuis un moment déjà, Blake MacLeod observait la jeune femme.

Ses yeux s'étaient posés sur elle tout à fait par hasard lorsqu'elle avait surgi de l'ascenseur en titubant. Elle avait attiré son attention par la pâleur de son visage parsemé de taches de rousseur et par la manière abrupte dont elle s'était arrêtée, l'air paniqué, ?xant le sol du hall tout en mordillant sa lèvre inférieure.

En d'autres circonstances, Blake n'aurait probablement pas jeté un second regard à une femme seule qui ne payait pas de mine, mais il mourait d'ennui et accueillait la moindre distraction avec un plaisir exagéré. Il n'avait accepté de venir à la soirée donnée au restaurant de la Sky Tower d'Auckland que sur l'insistance de son hôte, un client important, et il songeait déjà à la manière de s'esquiver sans se montrer discourtois. Si la perspective de côtoyer une foule de gens in?uents l'avait réjoui autrefois, à trente-trois ans il n'éprouvait plus le besoin d'impressionner les autres.

Debout près de l'une des fenêtres, il avait vu l'inconnue avancer d'un pas hésitant jusqu'à l'aire de réception, se fondre dans la masse des invités. Avec son parapluie pliable serré contre sa poitrine, sa silhouette enveloppée dans un ample imperméable marron, sa ?gure ovale nimbée de boucles brunes, elle ressemblait à un moineau égaré dans un troupeau de paons.

Se détournant de la conversation obséquieuse de ses compagnons, Blake s'interrogea sur l'attitude étrange de la nouvelle venue. S'agissait-il d'une intruse craignant de se faire repérer ? Impossible. Jamais elle n'aurait franchi le poste de sécurité sans carton d'invitation. Peut-être était-elle simplement sujette au vertige ? Ce qui expliquerait pourquoi son regard évitait de se porter vers les immenses baies vitrées battues par la pluie, surplombant la ville qui se déroulait, tel un tapis lumineux, au pied de l'immense édi?ce. Dans ce cas, quel diable l'avait poussée à accepter une invitation à une réception donnée en haut de la tour la plus haute de l'hémisphère Sud ?

L'une des hôtesses des vestiaires s'approcha d'elle, l'aida à s'extraire de son imperméable, la débarrassa du vêtement et du parapluie. Le moineau ramassa le sac brodé de perles que ses mains avaient laissé tomber, le coinça sous son coude, se dirigea alors, d'une démarche raide, vers les quelques marches conduisant aux tables installées au niveau inférieur, tout en observant la foule des invités avec une expression où se lisait un curieux mélange de timidité et de détermination.

Blake faillit s'étrangler dans son verre lorsque la jeune femme passa sous les luminaires vivement éclairés. Jamais il n'aurait imaginé que l'imperméable informe cachait une robe aussi sophistiquée. Le fourreau noir, sans bretelles, avait été manifestement conçu pour attirer les regards et attiser le désir des hommes. Malheureusement, il ne lui allait pas du tout. Au lieu de rehausser sa féminité, il soulignait ses imperfections, faisait paraître trop larges ses épaules constellées de taches de rousseur et le reste de son corps trop étroit. Sa silhouette, tout en angles, évoquait plus celle d'un adolescent que celle d'une femme épanouie. Quant à son visage, il donnait l'étrange impression d'être nu, malgré — ou peut-être à cause de cela — le lourd maquillage de ses yeux. Elle était grande. Ses longues jambes représentaient sans doute son meilleur atout, songea Blake. Mais comme l'ourlet de la robe s'arrêtait bien au-dessous des genoux, il ne pouvait avoir con?rmation de ses suppositions. Alors qu'elle descendait l'escalier, chancelant sur des talons aiguilles démesurés, sans cesser de mordiller sa lèvre inférieure, il se dit qu'elle ressemblait surtout à une gamine à la frimousse tachée de son, qui se serait déguisée avec les vêtements de sa mère.

Ce n'était pas du tout le genre de femmes qu'il aimait fréquenter, pensa-t-il, alors qu'elle atteignait le bas de l'escalier. Elle s'était saisie d'un verre de vin sur le plateau le plus proche, d'un geste si gauche qu'elle en répandit la moitié du contenu sur la veste impeccable du serveur. Elle se confondit en excuses avant d'aller se fondre discrètement dans la foule.

Blake eut, soudain l'impression que l'inconnue passait une grande partie de son temps à se faire pardonner ses maladresses.

Non, elle n'était vraiment pas son genre.

Blake choisissait toujours pour maîtresses des femmes du monde, belles, sûres d'elles-mêmes, qui sollicitaient l'attention plus que l'intérêt, qui ne se mettaient jamais dans des situations embarrassantes — physiques ou émotionnelles. Des femmes qui se montraient des amantes sincères sans menacer son indépendance et acceptaient de rester ses amies une fois leur liaison terminée.

Pourquoi le moineau continuait-il à titiller sa curiosité ? Comme Blake mesurait plus d'un mètre quatre-vingt-deux et que, perchée sur ses talons, la mystérieuse brune était presque aussi grande que lui, il n'avait aucune dif?culté à la suivre des yeux. Il remarqua qu'elle se tenait à l'écart des fenêtres, et bougeait à peine de l'endroit où elle s'était réfugiée et d'où elle regardait, tout en sirotant son vin, le dé?lé des invités.
S'identifier pour envoyer des commentaires.

Autres contributions de...